Bpifrance investit dans le tourisme : l’Outremer en marge

Deux ans après le lancement du fonds France Investissement Tourisme (FIT) de Bpifrance, 30 entreprises du secteur tourisme et loisirs ont été accompagnées. Parmi elles, aucune située en Outremer. 

Un fonds ambitieux

Le fonds France Investissement Tourisme, a pour objectif « d’accompagner les transformations, de stimuler l’innovation et d’accroître la compétitivité des entreprises du tourisme et des loisirs ». Sur les 100 millions d’euros de dotation, 53 millions ont déjà été investis….dans des entreprises hexagonales.

Ce fonds « prend des participations minoritaires dans les entreprises du secteur pour des montants compris entre 0,5 et 5 millions d’euros, en fonds propres et quasi fonds propres. En intervenant en co-investissement avec des acteurs privés et, si nécessaire, avec les fonds de Bpifrance pouvant investir des montants plus importants, le FIT joue un rôle de catalyseur pour des opérations structurantes. »

Il s’adresse aux professionnels de l’hôtellerie, de la restauration, du voyage et des transports touristiques, des loisirs et des solutions pour le tourisme. Il poursuit 5 objectifs :

  • Favoriser la mutation des acteurs traditionnels
  • Créer des ETI autour de marques fortes
  • Renouveler l’offre touristique et les services autour des loisirs
  • Travailler avec les régions sur les logiques de destinations et d’écosystèmes.

Pas de volonté d’exclusion de l’Outremer, mais une réalité qui pique toujours

Officiellement, il n’y a pas de démarche délibérée de laisser l’Outremer en marge. Au contraire, « c’est une question d’opportunités dans le temps et de dirigeants qui sont prêts à nous laisser entrer au capital », nous a confié une source proche du dossier.

Mais le biais est plus insidieux : pour investir dans des entreprises, Bpifrance doit d’abord les identifier, se faire connaître auprès d’elles avant de pouvoir les accompagner. Et c’est là que le bât blesse. Est-ce que tout a été fait pour faire connaître ce fonds d’investissement et aller volontairement vers les entreprises qui pourraient être concernées ? 

  • Les relais locaux cartographient-ils les entreprises ultramarines prometteuses du secteur tourisme et loisirs, en faisant remonter l’information auprès du siège parisien ?
  • Comment la diffusion de l’information est-elle effectuée ? Auprès des médias nationaux et locaux ?
  • Y a-t-il une veille active sur le secteur touristique ultramarin ?
  • Y a-t-il des rencontres, dans ces territoires, pour sensibiliser les entrepreneurs à l’existence de ce fonds dédié au tourisme ?

Est-ce que le parcours d’obstacles des entrepreneurs du tourisme a été facilité ?

Les mauvaises langues diront que la démarche doit être réciproque et que rien n’empêche les entrepreneurs d’Outremer de contacter librement Bpifrance. Certes ! Mais en réalité, inclure l’Outremer demande bien souvent de changer son mode de pensée et son mode opératoire pour des structures installées dans l’hexagone. C’est se contraindre à penser de manière inclusive. 

Un problème récurrent

La marginalisation des territoires d’Outremer dans les programmes d’accompagnement de l’innovation n’est pas nouvelle. Certains concours ou subventions sont purement et simplement réservés à la « métropole ».
Pour d’autres en revanche, pas de clause discriminatoire mais l’argument selon lequel « c’est plus compliqué d’inclure les DOM-TOM » est largement utilisé. En effet, repérer, valoriser, accompagner les entrepreneurs français en Asie, en Afrique ou aux Etats-Unis serait beaucoup plus simple que dans des territoires francophones.
D’autres enfin sont totalement méconnus par les administrations en place au niveau local.

La Ministre de l’Outremer a évoqué la volonté de mettre en place des référents spécialisés dans plusieurs administrations. Il serait en effet temps de se forcer à décentraliser l’information,mais aussi les initiatives nationales en faveur de l’entrepreneuriat et l’innovation, particulièrement dans le tourisme. 

Le bilan du Fonds Investissement Tourisme est disponible ici.